Le blog des entrepreneurs La loi peut-elle protéger votre idée?
En tant qu’entrepreneur vous voulez protéger toutes vos idées contre le vol. Outre la bonne vielle technique du silence, existe t’il des mécanismes juridiques qui permettent de protéger votre idée?
En tant qu’entrepreneur vous voulez protéger toutes vos idées contre le vol. Outre la bonne vielle technique du silence, existe t’il des mécanismes juridiques qui permettent de protéger votre idée?
Après plusieurs tentatives pour lancer son activité, Arthur pense enfin avoir trouvé l’idée révolutionnaire qu’il attendait. Avant de se lancer il décide de demander conseil à son ami de longue date, Lancelot, qui a lui-même lancé sa propre activité de vente de boissons, laquelle rencontre un grand succès.
Arthur lui expose alors son idée avant de lui demander son avis. Il lui explique qu’il souhaite lui aussi se lancer dans la vente de boissons et qu’il pensait avoir trouvé une recette signature.
Lancelot écoute attentivement l’idée de son ami mais se montre sceptique, et lui déconseille de se lancer avant d’avoir murit son projet.
Un peu dérouté par cette discussion, Arthur décide de réfléchir un peu plus à ce projet, il craint un nouvel échec et prend les critiques de son ami très au sérieux.
Toujours en pleine phase de réflexion, Arthur apprend que La société « Lancelot, SARL » lance un nouveau produit, il s’agit d’une nouvelle boisson dont la composition ressemble étrangement à la description qu’Arthur a fait à son ami quelques semaines plus tôt. Arthur ne veut pas y croire, mais il n’a d’autre choix que d’en prendre acte, il s’est fait voler son concept par Lancelot.
Arthur se sentant trahi par son ami se retrouve désemparé mais il ne compte pas se laisser faire, il réclame vengeance et réparation !
Arthur mène son enquête et découvre qu’en l’absence de droit privatif ou de document susceptible de prouver l’antériorité de son idée, la loi ne lui offre aucune protection. En effet, deux actions étaient envisageables dans ce cas mais l’absence de preuve ou de droit privatif fait échec à l’action.
Arthur a d’abord envisagé d’intenter contre son ancien ami, une action en contrefaçon ; il estime être l’inventeur initial de la recette utilisée par Lancelot que ce dernier « n’a pas le droit d’utiliser son œuvre ! ».
La contrefaçon se définit comme étant une atteinte au droit privatif conféré par un titre de propriété intellectuelle. En d’autres termes, pour parler de contrefaçon il faut qu’existe un titre de propriété qui confère à une personne un droit privatif, et que ce droit ait été enfreint par un tiers.
Dans notre cas, Arthur est bien, a priori, à l’origine de l’idée utilisée par Lancelot, mais l’idée d’Arthur ne fait l’objet d’aucune protection par titre, il n’a donc pas de droit privatif sur l’exploitation de cette idée.Rien ne vient juridiquement attester qu’Arthur est bien à l’origine du produit lancé par Lancelot.
Les éléments ne sont pas suffisants pour caractériser une contrefaçon.
Déçu de ne pouvoir attaquer sur le terrain de la contrefaçon, Arthur ne se démonte pas pour autant. Il s’est renseigné et découvre que les modalités pour engager une action en concurrence déloyale contre son ancien ami sont beaucoup moins contraignantes.
Bien souvent l’action en contrefaçon est présentée comme un auxiliaire de l’action en concurrence déloyale. Toutefois ces actions ont des finalités différentes, d’une part l’action en contrefaçon vise à sanctionner l’atteinte à un droit de propriété intelectuelle ou industrielle que cette atteinte ait été ou non intentionnelle ; d’autre part, l’action en concurrence déloyale vise à sanctionner une faute ou plus largement un comportement qui serait en quelque sorte contraire à la « déontologie » commerciale.
Le succès de cette action suppose qu’il existe une faute, un préjudice, et que les deux soient reliés entre eux par un lien de causalité.
Toutefois un préalable de l’action, c’est que les parties soient concurrentes l’une de l’autre. En droit français, la concurrence déloyale ne fait pas l’objet d’un droit spécial. En conséquence, la « concurrence » n’a pas de définition juridique consacrée. Néanmoins on peut considérer que la concurrence est l’état d’un marché sur lequel des acteurs (les concurrents) peuvent se faire compétition.
En d’autres termes celui qui se dit victime d’un acte de concurrence déloyale doit être sur le même marché économique que l’auteur présumé de l’acte.
Bien qu’en l’état actuel du droit, la notion « être sur un même marché économique » soit très largement appréciée par les juges. Celui qui ne mène pas une activité économique et commerciale ne peut jamais se trouver sur le même marché économique que celui qui mène ce type d’activité.
L’action d’Arthur en concurrence déloyale ne pourrait pas aboutir puisque n’ayant pas lancé son activité, il ne se trouve sur aucun marché économique. En effet, il avait une idée mais il n’a pas mis en œuvre une activité économique faisant de lui l’acteur d’un marché économique.
Dans les faits, il n’y a aucun moyen pour Arthur d’obtenir réparation pour l’utilisation de son idée par Lancelot, pour cause, une idée, sans titre permettant d’en protéger l’utilisation ne vaut rien juridiquement. Sans titre, le droit protègera l’expression de l’idée c’est-à-dire son utilisation, notamment par le mécanisme du droit d’auteur, mais l’idée elle-même tant qu’elle n’est pas exprimée ou matérialisée n’est pas protégée.
Le vol d’idée est une inquiétude justifiée pour l’entrepreneur. En effet, l’idée, c’est le départ de l’aventure entrepreneuriale. Lorsque l’on a une bonne idée, il est malheureux de la voir être appropriée par un autre. Heureusement ce n’est pas une fatalité, le droit prévoit des mécanismes qui d’une part permettent un minimum de protection, mais d’autre part, ce sont aussi des modes de preuves redoutables afin de réclamer la paternité de vôtre idée.
Ce mécanisme est très efficace mais la violation de la clause ouvre uniquement droit à des dommages et intérêts. La clause permet la réparation monétaire de la victime, mais elle ne permet pas de faire cesser les activités découlant de la violation des obligations posées.
Il existe des moyens de « protéger son idée », certains permettent d’obtenir un titre établissant la paternité de l’idée, d’autres sont simplement des moyens de preuve à l’appui d’une action en responsabilité extra-contractuelle.
Si ces moyens sont efficaces, ils ne peuvent cependant pas toujours faire cesser les activités découlant du vol d’idée, le meilleur moyen reste encore de lancer son activité sans trop tarder. De plus le vol d’idée ou de concept, bien qu’il soit un évènement malheureux, n’est pas forcément dramatique ; en effet, il est possible que vous puissiez toujours exploiter vôtre concept en y ajoutant vos spécificités et ainsi faire utilité du jeu de la concurrence.
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