Le blog des entrepreneurs La responsabilité juridique de l’entrepreneur

Un entrepreneur peut-il être condamné même si la faute est commise par quelqu’un d’autre?

La responsabilité pénale du dirigeant est d’une telle complexité qu’il faut être vigilant. Quelles sont les différentes sources des infractions pénales dans le monde des affaires? Que faut-il entendre par la responsabilité pénale du dirigeant? Pourquoi un dirigeant peut-il être poursuivi pénalement pour les actes illicites commis par autrui? Quelles sont les conditions pour que sa responsabilité soit engagée? Comment peut-il prouver son innocence?

I. La complexité du droit pénal des affaires

Le droit pénal des affaires concerne les infractions caractérisées dans le monde des affaires. Il s’agit d’un droit spécial relatif à la criminalité des affaires. Par le terme “criminalité”, il conviendra d’entendre par là tout acte qui est contraire à l’ordre social.

Il est primordial que cet acte soit prévu par la loi et réprimé par une sanction établie par cette même loi. C’est ce qu’on appelle le principe de la légalité des crimes et délits: un principe fondamental du droit pénal.

La complexité du droit pénal des affaires vient du défaut formel des incriminations. Alors que le principe de la légalité des crimes et des délits crée une sécurité juridique en exigeant que chaque acte incriminé soit clairement détaillé. Or, nous observons en droit pénal des affaires beaucoup de défauts formels des textes.

De plus, la variété d’infractions pouvant s’appliquer dans la vie des affaires et par l’absence d’un code pénal droit des affaires répertoriant toutes les infractions n’est pas pour faciliter la compréhension de cette matière. Pour prendre connaissance des infractions auxquelles pourraient s’exposer les dirigeants, il faut parcourir plusieurs codes et lois non codifiées.

Pour toutes ces raisons, les dirigeants se retrouvent dans une situation d’insécurité juridique du fait de la complexité de cette matière.

 

TABLEAU MONTRANT LA VARIETE DES SOURCES DES DIFFENRENTES INFRACTIONS DE LA VIE DES AFFAIRES

 

Nature de l’infraction  Sources                Exemple               
Infraction de droit commun Vol, Escroquerie, Abus de biens sociaux, Favoritisme, Prise illégale d’intérêt
Infraction contre la personne Livre II du code pénal Infraction d’homicide, Infraction d’agression sexuelle, etc.
Infraction en matière de traitement des données personnelles Loi de 1978 modifiée : Loi Informatique et libertés Traitement non déclaré de données personnelles
Infraction contre les biens Livre III du code pénal Vol, Chantage, Abus de confiance, Extorsion, Escroquerie.
Infraction contre la nation Livre IV du code pénal Faux et usage de faux, Corruption, Prise illégale d’intérêt, Trafic d’influence
Infraction propre à la vie des affaires

Nous reverrons toutes ces infractions dans une fiche pratique.

II. Responsabilité pénale du dirigeant

En matière de responsabilité, le droit civil admet sans ambiguïté la responsabilité du fait d’autrui. Cependant, en ce qui concerne le droit pénal nous, l‘article 121-1 du Code Pénal nous rappelle le principe selon lequel : la responsabilité est personnelle. Cet article du code pénal dispose que : “nul n’est responsable pénalement que de son propre fait”Ce qui veut dire qu’une personne peut être poursuivie civilement pour des faits commis par autrui alors que personne ne peut être poursuivie pénalement pour des faits commis par quelqu’un d’autre, à moins d’être co-auteur ou complice.

L’indifférence de la distinction entre dirigeant de fait et dirigeant de droit (A) en matière de responsabilité pénale trouve sa source dans ce principe.

Cependant, ce principe de la responsabilité pénale connaît une certaine adaptation en fonction de la complexité de certains milieux des affaires (B): C’est le cas des entreprises ou professions réglementées.

 

A. LA DISTINCTION DIRIGEANT DE FAIT ET DIRIGEANT DE DROIT

En matière de gestion d’une entreprise, nous observons deux types de dirigeant. La situation la plus courante est celle d’un dirigeant, personne physique ou morale, qui a été officiellement désigné dans les statuts pour exercer les pouvoirs de gestion et de direction. Il s’agit d’un dirigeant de droit.

La seconde situation est celle d’une personne physique ou morale qui, bien qu’elle n’a pas été désignée dans les statuts pour prendre la gestion et la direction de l’entreprise, agit comme si elle avait été désignée  pour occuper ces fonctions. Dans un tel cas, il s’agira plutôt d’un dirigeant de fait.

Cette distinction a-t-elle des impacts quant à la responsabilité du dirigeant? En matière de responsabilité pénale des dirigeants, cette distinction entre dirigeant de fait et dirigeant de droit n’a aucune utilité. La responsabilité pénale du dirigeant de l’entreprise est liée à la fonction de dirigeant, mais aussi  à l’acte incriminé qui a été commis.

 

B. RESPONSABILITE PENALE DU FAIT D’AUTRUI

C’est surtout dans des professions réglementées que la jurisprudence constate des cas où une personne (souvent le dirigeant) est déclarée coupable d’une infraction d’imprudence par le fait d’autrui. Les juges considèrent que c’est à cause de l’imprudence du dirigeant qu’un employé a pu commettre l’infraction.

Dans un arrêt de principe de la chambre criminelle de la cour de cassation, du 30 décembre 1892, la cour de cassation avait rappelé d’abord la personnalité de la peine avant de préciser qu’il existe des dérogations dans les cas où des obligations légales exigent au dirigeant des conditions et des modes d’exploitations.

Pour être plus claire, nous allons prendre l’exemple de Will qui est le dirigeant de Will & Associés, une entreprise qui évolue dans le bâtiment et la construction de routes. C’est un secteur très réglémenté pour des questions de sécurité. Si un des employés commet une infraction à l’encontre de la législation en matière de sécurité des chantiers, c’est Will qui sera tenu responsable.

En effet, pour des entreprises ou professions réglementées, il incombe au dirigeant de veiller personnellement à l’application des obligations légales ou réglementaires applicables dans son secteur de travail.

Si vous êtes par exemple entrepreneur dans la restauration, vous saurez par exemple qu’un responsable de bar a été jugé pénalement responsable du fait d’autrui par la cour de cassation dans son arrêt du 30 mai 1996. La cour lui reprochait l’inobservation des obligations contenues dans le code des débits de boisson et des mesures contre l’alcoolisme. Pourtant, l’acte incriminé avait été commis par un serveur.

Cette responsabilité pénale du fait d’autrui est une condamnation en bonne est de la forme qui s’accompagne avec toutes les conséquences d’une condamnation. Ce qui signifie que le dirigeant qui sera jugé pénalement responsable du fait d’autrui verra sa responsabilité engagée et figurée dans son casier judiciaire.

III. Une responsabilité pénale du fait d’autrui placée sous condition

On pourrait trouver injuste ce raisonnement qui aboutit à la condamnation du dirigeant pour un acte illégal qui n’a même pas commis.

Pour mieux comprendre cette logique, il faut raisonner autrement. Accepter d’être dirigeant d’une entreprise c’est accepter les risques liés à cette fonction. L’intérêt public veut que le dirigeant d’une entreprise soumise à une réglementation s’engage au respect de la réglementation imposée par la loi et les règlements.

A. CONDITIONS

Pour que la responsabilité pénale du dirigeant soit engagée, il faut réunir trois types de conditions:

 

1. Profession réglementée

La responsabilité pénale du dirigeant pour fait d’autrui est engagée lorsque son activité s’inscrit dans le cadre d’une profession réglementée. Dans de telles circonstances, les juges considèrent que le dirigeant doit veiller au respect des textes régissant son activité pour l’intérêt du public mais aussi pour l’intérêt de ses employés.

 

2. Infraction commise par un préposé

Le préposé est une personne qui accomplit à titre onéreux des actes sous la direction et la responsabilité d’une autre personne. Cette personne auteur de l’acte illicite doit être l’employé du dirigeant. Cet employé sera lui aussi poursuivi pour son acte.

 

3. Une faute imputable au dirigeant

C’est une condition qui vise à rattraper le principe selon lequel la responsabilité pénale est personnelle. Pour que la responsabilité du dirigeant soit engagée suite à un acte d’autrui, il est important de mettre en évidence une faute qui lui sera imputable. C’est-à-dire une faute qui lui est personnelle. Cela pourra consister par exemple à montrer que le dirigeant a failli à son devoir de surveiller le respect des règles.

B. MOYEN DE DEFENSE DU DIRIGEANT

Le dirigeant pourra prouver qu’il n’est pas responsable de l’acte illicite commis par son employé en prouvant qu’il n’a pas commis de faute. Cela peut passer par une démonstration prouvant qu’il ne pouvait pas prévoir un comportement dangereux de son préposé. C’est notamment la décision qu’a prise la cour de cassation dans son arrêt du 14 octobre 1986.

Un dirigeant qui réussit aussi à prouver qu’il avait procédé à une délégation de pouvoir échappe aussi à cette responsabilité pour fait d’autrui

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